Dernière mise à jour le 12/08/2024
Bande de Flippés, c’est notre podcast en partenariat avec myRHline.
Dans cet épisode :
- Charles Avenel – Chargé de recrutement chez Manitou Group
- Sa peur : ne pas trouver de candidat
Vous pouvez l’écouter, ou simplement lire la transcription ci-dessous.
Bouh !
À retenir de cet épisode
- La peur de ne pas trouver de candidat est fréquente chez les recruteurs.
- L’image de l’entreprise joue un rôle clé dans l’attraction des talents.
- Un processus de recrutement trop long peut décourager les candidats.
- La transparence sur les conditions de travail est essentielle pour attirer des profils motivés.
- Se démarquer par une proposition de valeur claire aide à attirer les meilleurs.
- Les soft skills sont devenues aussi importantes que les compétences techniques.
- S’adapter aux attentes des nouvelles générations est crucial pour recruter efficacement.
« La peur est souvent un signal pour réévaluer et ajuster sa stratégie de recrutement. »
La transcription de l’épisode
Charles [00:00:00] J’ai peur de ne pas trouver de candidats ou de ne pas trouver le bon candidat.
L’étincelle RH Bienvenue dans Bande de Flippés, le podcast qui explore les peurs des DRH et des recruteurs. Que l’on ait 2 ou 20 ans d’expérience dans la fonction, les doutes subsistent, inhérents à la complexité de la nature humaine. A qui puis-je en parler ? Dois-je partager à ce sujet ? Où trouver les solutions ? Nous partons à la rencontre de DRH, RH, recruteurs et recruteuse qui se confient à notre micro et ont décidé d’affronter la peur de parler de ses peurs.
L’étincelle RH [00:00:30] On se retrouve aujourd’hui avec Charles, recruteur de Manitou Groupe. Un master 2 en finance, un master 2 en droit des affaires, un master 2 en ressources humaines, une expérience du recrutement chez Naval Group et l’ADEME. Et pourtant flippé. Bonjour Charles.
Charles [00:00:45] Bonjour.
L’étincelle RH [00:00:46] Est ce que tu peux nous expliquer ta peur ?
Charles [00:00:48] Oui, ma peur est toute simple, elle est liée à mon métier de recruteur : la peur de ne pas trouver de candidats ou de ne pas trouver le bon candidat. Finalement, trouver des candidats, ça peut être parfois simple mais trouver le bon candidat pour le poste, c’est déjà beaucoup moins simple.
L’étincelle RH [00:01:02] Quand tu dis “ne pas trouver de candidats”, c’est “je n’ai aucun candidat à présenter à mon manager” ? “Je n’ai pas le candidat qui correspond au cahier des charges” ? C’est quoi ne pas trouver de candidats ?
Charles [00:01:11] C’est un peu tout ça. Un peu tout ce que tu viens de dire finalement. Le problème principal, surtout dans un marché assez tendu, c’est de ne pas trouver de candidats tout court. Alors pas trouver de candidats, surtout ne pas trouver de candidats qui puissent correspondre au cahier des charges qu’on nous demande dès le départ. Et puis en fait, pour s’assurer aussi que la personne puisse être recrutée, il faut finalement trouver le bon candidat, c’est-à-dire le candidat que le responsable ou le manager avec qui on travaille recherche. Et là, il y a toujours un petit écart entre ce que nous on trouve et ce qu’on pense va convenir et ce qui finalement va convenir au manager.
L’étincelle RH [00:01:41] Et ne pas trouver de candidats, c’est être un mauvais recruteur ? Comme un mauvais commercial qui ne vendrait pas ?
Charles [00:01:47] Alors c’est une bonne question. C’est une très bonne question qui est bien plus vaste qu’on ne le pense. Est-ce que le fait de ne pas trouver de candidats, ça fait de soi un mauvais recruteur ? Au premier abord on a envie de dire oui, en fait spontanément, puisque la mission d’un recruteur ça reste quand même de pourvoir un poste et de trouver des candidats. Pour autant, il y a tout un tas de raisons qui font qu’on ne va pas pouvoir trouver de candidats ou ne pas pourvoir le poste. Et de facto, on peut très bien, avec un peu de recul, constater qu’un recruteur fait bien son travail. C’est-à-dire qu’il a un brief qui est clair, le poste est bien défini, la recherche est structurée, les messages d’approche aussi auprès des candidats est structuré, l’annonce qui est rédigée aussi également est claire, donne envie, est attractive dans les standards de la profession. Et en fait, quand on analyse tout ça, on se rend compte que le job est fait. Et puis derrière il peut y avoir plein de causes, c’est-à-dire un marché qui est très équilibré, avec des gens qui sont tous en poste, pas intéressés. On peut avoir des problèmes liés au poste ou à la localisation du poste qui peut être très impactant pour trouver des candidats. Et puis d’autres sujets, ça peut être tout simplement un métier de niche où on cherche un mouton à cinq pattes, six pattes. Et le marché ne répond pas à ça, à ce besoin.
L’étincelle RH [00:02:57] Si ce n’est pas le fait de trouver un candidat qui fait qu’on est un bon ou mauvais recruteur, c’est quoi un bon recruteur ?
Charles [00:03:04] Eh bien un bon recruteur… c’est une bonne question. Je pense qu’un bon recruteur, c’est déjà quelqu’un qui est suffisamment curieux pour poser les bonnes questions. Je pense qu’un bon recruteur, LA compétence du recruteur, c’est de poser des questions. On en a parlé tout à l’heure dans la question de savoir si ça faisait un mauvais recruteur de ne pas trouver de candidats. En fait, il y a tout un travail en amont, avant même d’avoir un candidat à présenter. Finalement être un bon recruteur c’est avoir une méthodologie de travail, c’est être formé aux méthodes de sourcing par exemple, ou de recherche active de candidats. On en a parlé aussi mais la rédaction des annonces, à une époque où on faisait simplement un copié-collé d’une fiche de poste sans finalement trop se poser la question de la qualité de lecture, de l’envie de lire l’annonce aussi. Et puis surtout, l’annonce est quand même aussi le premier reflet de plusieurs choses : du poste certes, de l’entreprise également. Parfois, il y a des choses qui transpirent dans une annonce qui donnent envie de rejoindre des valeurs, une mentalité, etc. Un ton aussi. Et de ce fait là, le recruteur, il est vraiment acteur dans la rédaction de l’annonce. C’est son job. C’est le job du manager de faire comprendre son besoin, d’avoir un poste structuré etc, mais c’est aux recruteurs de présenter le poste. Donc de fait, on a tous ces enjeux là avant même de trouver un candidat, de compréhension du besoin, de questionnement. Je le répète, c’est vraiment le plus puissant levier pour être un bon recruteur. Et puis derrière cette méthodologie de recherche et de structure.
L’étincelle RH [00:04:28] Dans ta réponse tu évoques des éléments qui font partie du processus de recrutement. C’est quoi justement les étapes clés pour toi dans le processus de recrutement ?
Charles [00:04:34] Le premier élément, qui en fait le point de départ, qui est ce qu’on appelle le brief de poste. C’est le moment où finalement, le recruteur va se mettre en lien avec le chef d’équipe ou le responsable d’une équipe, ou même un directeur, qui cherche à intégrer une personne à son service. Donc le brief de poste c’est le moment où le recruteur va devoir prendre connaissance du besoin, découvrir parfois le poste.
Un recruteur n’est pas un spécialiste de tous les métiers. Les recruteurs peuvent se spécialiser, mais ce n’est pas forcément le cas. Et donc ce moment là est clé puisque c’est une rencontre. C’est une prise de considération des besoins du manager, de sa personnalité aussi, puisque demain certes on va recruter un candidat pour un poste, mais on va aussi recruter parfois un candidat pour aller aussi avec ce chef d’équipe ou ce manager. On va créer une rencontre. C’est aussi ça qu’il est important d’avoir en tête.
Et donc ce brief là est hyper structurant. Il va être aussi structurant pour une autre raison qui va être le contenu même des missions, le contenu même du poste pour derrière, être en en capacité de le présenter de manière claire aux candidats qu’on aura identifiés pour leur donner envie. Pour attirer les personnes, les bonnes personnes, sur le poste.
Et puis derrière une autre chose qu’on ne voit pas aussi en backstage, ça va être plutôt cette partie de tirer des mots clés à partir d’un brief de poste, d’un métier ou de tâches. Parce que le recruteur, il va aussi faire ce petit travail de fourmi de recherche sur des bases de données LinkedIn, dont on parle souvent, pour aller justement identifier ces profils là et concorder avec le besoin. Est-ce que typiquement sur un poste d’ingénieur R&D, on va avoir besoin par exemple de notions de code ? Et dans quel cas ? Quel type de code, quel langage ? Ce langage là peut nous permettre de filtrer avec ce mot clé les profils qui maîtrisent ce langage ou ceux qui ne le maîtrisent pas.
L’étincelle RH [00:06:17] Dans le recrutement en entreprise, le brief c’est parfois le parent pauvre parce qu’on a à la fois beaucoup de postes à gérer et pas le temps, parce qu’on connaît déjà l’organisation. Finalement, est-ce que j’ai besoin de repasser du temps avec des managers dans une relation que je connais, pour reprendre un brief sur un poste que j’ai déjà pu gérer par le passé, qui fait qu’on passe à côté de cette étape-là. Elle est nécessaire quand on est dans l’entreprise ? Ou finalement, le brief n’est pas toujours nécessaire parce qu’on connaît déjà l’organisation, vu qu’on en fait partie ?
Charles [00:06:47] Alors je le répète, je suis convaincu que c’est un des moments phare, voire LE moment phare du recrutement, puisque si on ne comprend pas le besoin, on n’est pas capable de trouver la personne. De fait, pour moi, deux réponses à ta question : si on n’est pas dans l’entreprise quand on est recruteur, en effet, il y a tout un vernis à avoir aussi de culture d’entreprise, des conditions de travail, etc. Une acculturation qui est accélérée en plus au moment du brief qui est fondamentale. De fait, là, on va se retrouver avec un brief qui doit être nécessairement long, structurant.
Quand on est en entreprise, ça reste une étape fondamentale. Mais peut-être qu’on gagne du temps parce qu’on est acculturé en entreprise, on peut en parler plus facilement, on en connaît les subtilités, etc donc on a déjà du bagage à présenter aux candidats. Pour autant, il ne faut pas s’endormir puisqu’on a déjà plusieurs types de métiers. Par exemple, on a des dizaines, voire des centaines de métiers différents dans Manitou Groupe. Je suis incapable de pouvoir les connaître par cœur. En plus, ils évoluent dans le temps. Les technologies avancent dans le temps, l’organisation avance dans le temps.
Donc même si vous êtes recruteur interne, vous avez déjà recruté un acheteur industriel, un ingénieur BE pour un service il y a un an, il est fort probable que le besoin ait changé parce que peut-être que l’équipe elle-même a changé, les missions ont changé, etc Donc on ne peut pas passer à côté du brief et en tout cas, on ne doit pas le négliger. Alors certes, la durée peut être réduite, mais on ne doit surtout pas négliger cette partie-là parce que c’est notre base de travail, pour demain.
L’étincelle RH [00:08:07] T’as souvenir d’un brief compliqué ? Comment on réussit son brief ?
Charles [00:08:11] Alors “le manuel du brief raté”, on va essayer de l’appeler comme ça. On peut rater de plusieurs façons.
On peut aller trop vite. Ça, ça peut arriver. Je plaide coupable. On peut aller un peu trop vite en pensant qu’on a tout compris. Ça paraissait clair. Et finalement quand on le relit à tête reposée une semaine après, c’est beaucoup moins clair quand on a le candidat au téléphone.
Ça peut être aussi tout simplement qu’on ne pose pas les bonnes questions. Mais parfois, on a par exemple des chefs d’équipe pour qui on travaille, qui vont être, on va dire, très volubiles ou en tout cas, vont donner beaucoup d’informations spontanément, très riches, inspirants, etc C’est très facile de travailler avec eux et de puiser de l’information.
Et parfois des personnes qui sont moins à l’aise pour expliquer un poste parce qu’ils le connaissent moins aussi parfois. Ils viennent d’arriver dans un service, viennent de prendre la direction du service. Ils ne connaissent pas forcément le poste en détail.
Puis les personnes qui sont simplement moins à l’aise pour présenter un poste. C’est là qu’on peut rater l’occasion finalement de comprendre le poste puisque si la personne vous parle pas ou peu de son poste, il faut aller chercher les infos. Et donc c’est là qu’on peut passer à côté, parce qu’on peut ne pas poser les bonnes questions, tout simplement.
Donc oui, on peut rater un brief. J’ai pu rater des briefs en allant trop vite, en ne posant pas les bonnes questions ou en ayant en face de moi quelqu’un qui n’était pas dans un niveau d’interaction forte et qui m’assèche un peu en termes de questions ou d’informations. Mais ça peut se rattraper en deux fois, en trois fois s’il le faut.
L’étincelle RH [00:09:35] On parle du brief comme une étape essentielle dans le fait de pouvoir ensuite trouver un bon candidat, trouver LE candidat qui est la peur que tu évoques.
Cette peur est liée à une situation que tu as pu vivre à un moment donné ? Tu as souvenir de situations où tu te dis “là, je ne trouve pas. J’ai le sentiment de me planter et pas y arriver” ?
Charles [00:09:51] Oui, oui, c’est fréquent. Très honnêtement, le recruteur qui vous dit actuellement que dans un marché assez tendu il ne peine pas à recruter, me surprendrait. Ou alors il a de la chance. Ou alors il est dans une bonne entreprise, au bon endroit, au bon moment.
Donc oui, ça m’est arrivé et ça m’est arrivé plusieurs fois sur différents métiers. D’ailleurs pas ceux que l’on croit. Ce sont pas forcément les postes de l’IT qui posent nécessairement problème. Il y en a évidemment. On peut avoir plus de difficultés, mais ça m’est arrivé.
Difficile de trouver un exemple comme ça parce que sincèrement, ça peut apparaître sur tout type de poste.
Parce qu’en fait, on peut avoir du mal à trouver le candidat dans la phase de sourcing, d’identification. Ça peut donc arriver dans l’IT, dans des postes avec des métiers en effet de niche. On parle de configurateur de machines par exemple chez nous. On parle de personnes qui font du logiciel embarqué, donc un métier un peu moins commun ou répandu. Et donc on peut se retrouver sur un bassin de l’emploi un peu pauvre, avec peu de candidats.
Donc là oui on va se retrouver bloqué.
Et puis le deuxième problème qu’on peut rencontrer, c’est de trouver des candidats et ne pas avoir de “oui” du responsable pour qui vous travaillez. Les profils qu’on envoie ne lui conviennent pas et là, on se retrouve asséché aussi en termes de candidats. Donc on peut se retrouver face à ce problème.
Nous on n’arrive pas à identifier de candidats, ça peut être notre responsabilité aussi, ou notre méthode de sourcing qui pose défaut ou notre annonce qui est mal rédigée également.
Ou alors en effet c’est peut-être un manager qu’on appelle “exigeant”, en tout cas qui a des attentes particulières. Et c’est là qu’il faut requestionner le besoin puisque si on a un manager qui vous dit “non” à une succession de propositions de CV qu’on estime rentrer dans les clous qu’on avait définis, soit les clous ont été mal définis soit tout simplement, ce qui peut arriver, c’est qu’on ne se parle pas en direct. On peut avoir une interposition par mail, et il faut représenter les candidats et aller au-delà du CV.
Alors évidemment ça peut aller sur la phase de sélection de CV, donc on ne se fie qu’aux CV. Donc le manager peut vous dire “non”, mais on peut aller plus loin en challengeant, en essayant de poser des questions, à partir de ce CV là.
Quand on a la chance d’avoir eu la personne au téléphone aussi en amont. On peut présenter des CV avec déjà des pré-qualifications. Là on peut déjà aussi présenter la personnalité, les centres d’intérêt, les motivations, etc qui peuvent aussi apporter de la plus-value qui va au-delà des simples compétences techniques dures et qui peuvent aussi apporter satisfaction, ou en tout cas une envie de la part du management de rencontrer la personne.
L’étincelle RH [00:12:09] Comment on gère un manager justement qui est “exigeant”, si je reprends ton terme, ou qui cherche le mouton à cinq pattes qui n’existe pas ?
Charles [00:12:17] Alors on le gère comme on peut.
Plusieurs façons de gérer ce type de personnes.
D’ailleurs, déjà, ils ont le droit d’être exigeants, parce qu’un recrutement est toujours sensible. On s’engage énormément pour plusieurs mois, voire années avec la personne, donc c’est un investissement en temps, en argent. Mais ce n’est pas qu’une question d’argent, c’est aussi une question de ne pas se rater simplement.
Donc je comprends les exigences des managers, on les gère, comme je vous l’ai dit, soit en requestionnant le besoin, peut-être le besoin n’était pas clairement défini. Peut-être qu’on l’a nous-mêmes mal compris. On revient à la phase de brief. On peut être passé à côté. Ou alors on peut avoir, en effet, un manager qui est, de facto, beaucoup trop exigeant par rapport à ses attendus. On rentre dans les cases de ses attentes et pour autant, ça ne passe pas. Il y a toujours un petit truc qui ne va pas. Ça peut être la langue, le diplôme, etc.
Et bien il faut se retrouver en face à face et expliquer qu’on ne va pas pouvoir trouver, si on ne dit pas “oui” à certains profils qui cochent les cases.
Et parfois, il faut aussi avouer qu’on arrive à des niveaux de responsabilité, on travaille avec des personnes qui ont un niveau assez haut dans la hiérarchie. Et on peut avoir aussi besoin d’un appui, d’une personne, d’une ressource RH, qui puisse compléter notre avis ou appuyer en notre sens pour pouvoir débloquer la situation.
Et ça peut-être un cas beaucoup plus simple : on a des personnes qui n’ont pas le temps. Qui va finalement lire le CV en diagonale et ne va pas s’y retrouver, ne va pas aller plus loin. Elle n’a pas le temps donc ne prend même pas ce temps de questionnement avec nous.
L’étincelle RH [00:13:45] Je suis jeune recruteur, je suis face à un manager qui à la fois me met une pression sur le poste, mais à la fois le manager je n’arrive pas à échanger avec lui. Comment je m’en sors ?
Charles [00:13:57]
Parfois, on peut être bloqué. Je pense qu’à minima, en tout cas, d’expliquer clairement en quoi la situation est bloquante pour nous et qu’on n’aura pas d’issue si on ne change pas notre fusil d’épaule. C’est à dire changement du besoin, des critères ou changement du mode de communication qu’on a avec le responsable (plus de fréquence, est-ce qu’on a besoin de se parler peut-être une demi-heure plutôt que d’envoyer au fil de l’eau ?).
Et si, malgré tout ça, ça ne fonctionne pas bien, il reste la dernière solution. C’est-à-dire qu’en fait la responsabilité reste quand même au manager de recruter. Il vient nous solliciter pour un besoin, donc c’est lui qui a ce besoin là. On est là pour l’accompagner, le conseiller. Et finalement, si il n’y a pas de réponse en face… Le recruteur est responsable de l’accompagnement, il n’est pas responsable du fait que ça ne débouche pas puisque ça reste aussi le manager qui est responsable de ce recrutement.
On pourrait même imaginer une structure où il n’y a pas de recruteur, d’ailleurs il y en a plusieurs des entreprises où il n’y a pas de recruteur dédié ou de DRH dédié, et ce sont les managers ou chefs d’équipe ou le directeur qui va recruter pour lui-même.
Donc il se retrouve bien en situation d’être responsable du recrutement et d’aller au bout, et quelque part de transiger de ses propres critères avec lui-même quand il va être en face des candidats et du marché.
Donc, il y a aussi cette notion là à remettre en avant, c’est-à-dire que la personne qui est bloquante, c’est lui montrer que c’est lui qui est bloquant et qu’il va se tirer une balle dans le pied.
L’étincelle RH [00:15:12] En effet c’est parfois bloquant par rapport à ce besoin d’exigence et d’avoir un mouton à cinq pattes.
Mais on a aussi parfois des situations où on ne trouve pas de candidats parce que finalement, le besoin change constamment. C’est-à-dire qu’à chaque CV qu’on propose, il y a des nouveaux critères qui apparaissent. Comment on appréhende ce type de situation ? Et c’est quoi les solutions ?
Charles [00:15:30]
Alors excellente question. Mais bizarrement je n’ai pas eu trop le cas.
Je n’ai pas eu beaucoup de changements du besoin par rapport au brief, c’est-à-dire que les personnes avec qui j’ai travaillé n’ont pas changé leur fusil d’épaule justement pendant les échanges ou au gré des candidats rencontrés.
Par contre on se rend compte, in fine, que finalement entre le choix final du candidat, c’est-à-dire le candidat choisi, et les critères initiaux, il se peut qu’on ait un peu dévié. Et donc on se rend compte en effet que les exigences qu’on avait au départ qui nous ont fait sélectionner ou mettre de côté certains candidats, ces critères on été un peu tempérés par rapport à la rencontre qui s’est faite, à la personnalité du candidat. Et puis du fait qu’en fait, ce qui se passe aussi, c’est que chemin faisant, le responsable manager avec qui on travaille va avoir rencontré différentes personnes et dans sa tête, ça va maturer, ça va avancer. Il va se rendre compte que finalement ces exigences initiales étaient pour certaines un peu moins importantes, que le niveau de langue est moins important, peut-être que la compétence technique sur tel ou tel outil est un peu moins importante. Il se rend compte qu’il faut qu’il y ait du fit avec l’équipe, que la personne soit spontanée, curieuse, qu’elle pose des questions et que ça lui paraît, ça lui devient criant en rencontrant les personnes, que ce critère-là est fondamental et les autres un peu moins.
On peut même arriver presque à renverser certains critères qu’on avait au départ.
On constate avec du recul qu’entre le brief du poste, l’exigence initiale et le candidat qu’on retient, il peut y avoir un petit décalage.
L’étincelle RH [00:17:00] D’où l’importance du brief que tu évoquais. Dans la difficulté à trouver un candidat ça peut parfois être lié en effet au fait que le brief a été mal structuré, parfois lié aux difficultés qu’on a avec un manager sur un niveau d’exigence. Mais parfois, c’est lié au simple fait qu’on n’arrive pas attirer parce qu’on est sur un besoin métier que j’ai appelé “peu sexy”. Une rémunération bien en dessous du marché, des conditions de travail très compliquées, parfois même un impact de marque employeur qui est un peu négatif. Comment on arrive à trouver un candidat quand on doit l’attirer sur un poste qui n’est pas sexy ?
Charles [00:17:35] Je pense qu’il y a plusieurs RH et recruteurs qui le vivent. Alors ce n’est pas évident en effet, vaste question…
Très honnêtement pour y répondre de manière synthétique, il peut y avoir plusieurs paramètres qui ne rendent pas sexy un poste.
La première, peut-être la plus simple, mais la plus compliquée à faire changer : ça va être la localisation d’un poste. Il y a des localisations qui ne sont pas sexy. Clairement, travailler au fin fond des Mauges plaît beaucoup aux gens qui viennent des Mauges, mais plaît beaucoup moins aux gens qui viennent de Paris, de Nantes ou de Bordeaux. Et donc d’aller projeter un très bon candidat sur un très bon poste, en l’occurrence, qui lui est sexy, mais dans une zone qui est bien moins densément peuplée, etc c’est radicalement différent et ça complique beaucoup. Là, on ne peut pas faire grand chose, parce qu’on ne va pas déménager ou délocaliser le poste.
Je sens poindre la question du télétravail à plein nez. En effet, on a le télétravail qui facilite un peu la tâche pour le sujet de la localisation. Pour autant, le présentiel reste important dans une organisation comme Manitou Groupe, mais dans d’autres organisations, on le voit dans les ESN qui commencent un peu à faire machine arrière (enfin plus précisément plutôt les majors type Facebook, Amazon). Donc la localisation peut être un problème.
La structure même du poste. En effet, les missions, les contraintes du poste. On peut avoir des sujets. Prenons un exemple concret, qui rend un poste un peu moins sexy : les horaires de travail.
On peut avoir des postes qui sont décalés ou avec des contraintes d’astreinte, avec des personnes qui ne sont pas du tout attirées par ça, ça se comprend, et donc on peut plus peiner à recruter. Et là, encore une fois, des critères finalement assez difficiles à retirer, à modifier, parce qu’on a besoin d’une couverture horaire à l’échelle d’une journée ou d’une semaine importante et d’où un critère difficile à contourner. Et donc on doit pour le coup pallier ce problème comme on peut.
On n’a pas beaucoup de recette miracle.
L’étincelle RH [00:19:26] Tu parles de recette miracle, c’est quoi les clés pour un recruteur ? C’est juste de la persévérance et du temps ? Il y a d’autres clés ?
Charles [00:19:35] C’est pertinent de poser la question. On travaille dans un métier qui est fondamentalement basé sur l’urgence.
On travaille assez peu en anticipé, ça arrive, mais c’est quand même pas fréquent. Soit on est contraint par un départ rapide d’une personne et il faut pourvoir le besoin, soit c’est un besoin qui vient de s’ouvrir : création de poste, mais qui est prévu pour un projet qui va sortir très rapidement et qui est critique. Donc on a beaucoup d’urgences.
De fait, il y a une notion de patience, je pense aussi.
Alors il faut… comment dire. Certaines personnes vont assez vite comprendre ça. Naturellement on a des opérationnels, des managers qui sont assez au fait de la situation du marché qui est très tendu. Ils le savent eux-mêmes parce qu’ils ont été parfois recrutés il y a pas longtemps. Donc ils comprennent ça.
La manière de trouver un bon candidat ça peut être certes dans les méthodes de recrutement, certes dans la qualité du recrutement, certes dans le côté “sexy” ou non d’un poste, ça peut être parfois aussi dans la patience. Parce qu’une annonce ne va pas forcément être vue, ne va pas forcément être repérée dans les deux premières semaines, même si c’est là où elle a un effet un peu rémanent et plus fort. Mais on peut très bien tomber sur un candidat qui n’avait pas vu et postulé et correspondre pile aux critères. Notre recherche peut aussi mettre du temps dans le sourcing. On peut lancer des hameçons, envoyer des messages à des personnes qui nous répondent quand elles veulent. Et elles ont raison parce qu’elles ne sont pas candidates. C’est avant tout des personnes, des salariés qui ont leurs occupations et qu’on doit transformer en candidat et donc elles se transforment elles-mêmes en candidats quand elles le souhaitent. Et il a pu m’arriver de pourvoir des postes avec le candidat idéal, quatre, cinq ou six mois après l’ouverture du poste. Mais finalement, sur certains profils, c’est accepté parce qu’on sait qu’il y a une tension. On le comprend moins quand c’est un métier où il n’y a pas de contraintes particulières sur un marché qui est globalement plutôt pourvu et sur une localisation qui ne doit pas poser de problèmes en théorie.
L’étincelle RH [00:21:22] Mais ça veut dire que sur ces métiers “non sexy” il y a des enjeux d’expérience candidats, de viviers, d’animation, pour maintenir un lien qui est plus fort que sur les autres postes ?
Charles [00:21:35] Potentiellement, oui. Disons que la logique de vivier, on l’entretient dans le service recrutement de manière quotidienne et pour la plupart des postes. Donc je ne pense pas qu’on fasse un focus particulier sur les postes qui sont moins “sexy”, Même si sans parler d’ailleurs d’attraction du poste.
Je pense que tous les postes où un recruteur a galéré à recruter, il a ancré dans sa mémoire que c’est compliqué, qu’il en a bavé, donc nécessairement quand on revoit passer un profil qu’on a cherché pendant des mois et qui spontanément vient à nous par réponse, par dépôt de CV, etc, on le stocke en effet, on le met de côté ou on le contacte pour avoir ne serait-ce qu’un premier fil à tirer peut-être pour demain. Parce qu’à ce moment-là on n’a peut-être pas le poste, mais on a le candidat. Normalement c’est l’inverse, on a le poste mais pas le candidat, mais ça peut arriver qu’on n’ait pas le poste. Et en effet on a cette logique de constitution de vivier, mais qui n’est pas propre au fait qu’un poste soit non “sexy”. Mais c’est vrai qu’on a une attention particulière si on a un poste vraiment galère.
L’étincelle RH [00:22:35] Justement, tu parles de poste galère. C’est quoi un poste difficile pour toi ?
Charles [00:22:41] Le pire poste au pire ou poste compliqué… Je pense que la première étape, on va revenir au brief, mais c’est un peu ce qu’on a du mal à comprendre. Je pense que pour un recruteur, c’est difficile de recruter quand on ne comprend pas le poste. Soit on ne comprend pas parce qu’il est mal expliqué, première raison. Mais somme toute, avec les questions, on peut arriver à avoir de bonnes réponses. Donc je pense que c’est surtout une question aussi d’expérience et d’antériorité du recruteur sur un métier ou un poste. Concrètement, si on n’a jamais recruté sur un métier de développeur par exemple, il y a un vernis, une capacité à absorber de l’information qui est très intense au début parce qu’on ne connaît pas le secteur et on a plein de questions. On n’est pas pertinent dans le questionnement et donc ce poste là va être vécu comme un peu galère et on va dire que “le pire poste” c’est un peu celui-ci puisqu’on ne connaît rien et on découvre, on défriche. Après, en effet, ça peut être le poste où on a à peu près compris le besoin, on est assez clair là-dessus et on se rend compte qu’il n’y a pas ou peu de candidats dans la zone ou même, peut-être encore pire à vivre, on peut avoir des candidats identifiés et finalement pas de réponses parce que les candidats sont déjà pris dans un contexte tendu. Un contexte tendu c’est quoi ? Globalement, des gens qui sont déjà en poste sur un marché et donc les personnes ne sont pas nécessairement intéressées. Donc on peut aussi avoir des candidats pour ce poste là, qui paraît finalement pas si mal, mais pas de réponse.
Est-ce que je peux vous donner un exemple de poste ? Ça ne me revient pas, mais j’ai forcément eu des postes compliqués. On a eu un projet au sein de Manitou Groupe qui s’appelait “Projet One”, dédié à la mise en place d’un PLM. On a dû recruter des consultants, en tout cas des ingénieurs pour développer, accompagner le développement et le déploiement du PLM. Et donc c’était compliqué parce que thématique pas de niche mais pas loin, un marché qui n’est pas inépuisable. Et puis des attentes fortes en termes de multiculturalité vers un poste avec de l’international et également aussi un marché où on se rend compte d’un petit décalage parfois entre le niveau de rémunération qu’on va proposer et les attentes aussi des candidats qui sont compétents pour ce type de poste. Donc ça a pu rendre le projet compliqué avec une notion de volumétrie, mais qu’on a réussi à pourvoir dans un temps un peu plus long que prévu.
L’étincelle RH [00:24:59] Je reviens sur cet exemple-là. C’est quoi les clés ? C’est des enjeux de méthode ? Des enjeux de processus ? Des enjeux d’outils, de moyens ? Comment on arrive sur ce type de recrutement à réussir ? C’est quoi les deux ou trois clés que tu pourrais partager ?
Charles [00:25:14] Je vais revenir à ma clé, toujours la même, mais je pense que la compréhension du poste est importante parce que c’est à partir de cette compréhension du poste et des mots clés qu’on va définir qu’on peut faire des bonnes recherches. On peut mettre des alertes aussi. On en n’a pas parlé, mais un recruteur c’est une personne qui aura des outils pour sourcer, chercher et trouver des CV sur des bases de données. Donc c’est de mettre les bonnes alertes en place aussi pour que dans le temps, pendant toute la durée du recrutement, s’il y a du mouvement sur le marché, on en soit au courant. Les clés c’est aussi de bien comprendre le besoin pour bien le retraduire aux personnes qu’on a au téléphone. On a eu justement des retours de la part des personnes qu’on a recrutées sur ce projet-là qui nous aidaient. Des retours plutôt satisfaisants de la part des recruteurs, notamment de ma collègue qui a beaucoup travaillé sur ce projet-là et qui était en capacité de tout de suite être impactante dans sa communication pour faire comprendre le poste, faire comprendre les enjeux, donner envie. Et ça, je pense que c’est structurant pour pouvoir mener à bien son recrutement. Et puis derrière, on en parlait tout à l’heure de ça, peut-être des sujets de localisation, des sujets de rémunération ; c’était de trouver des compromis, parfois de localiser un poste à un autre endroit que prévu, parce que c’était un poste qui était plus facilement télétravaillable et faisable à distance. Ça peut être des solutions. Ou de prévoir un scope de rémunération un peu plus large que prévu, parce que parfois ça se joue finalement à assez peu et c’est dommage de perdre un profil pour un, deux, trois, 4 % au niveau de la rémunération.
L’étincelle RH [00:26:32] La peur qu’on évoque aujourd’hui, la peur de ne pas trouver de candidats, elle renvoie aussi à une notion d’échec. On se dit “on a échoué en ne trouvant pas de candidats”. C’est quoi pour toi l’échec du recrutement, si ce n’est pas celui de ne pas trouver de candidats ? Comment tu vis l’échec dans le recrutement ? Et c’est quoi l’échec pour toi du recruteur ?
Charles [00:26:52] Hmmm, pour le coup, il y a des milliards de façons d’échouer. Ça peut être dans la méthode. Ça peut aussi bien être dans le résultat que dans les causes en fait. Mais je pense que de toute façon, l’échec reste le moment où vous n’arrivez pas à mettre une personne en face du poste et pas avoir trouvé la bonne personne. La question c’était sur quoi déjà ? Pardon !
L’étincelle RH [00:27:15] Sur l’échec pour toi dans la partie recrutement. Enfin, c’est quoi pour toi l’échec du recruteur si ce n’est pas celui de ne pas trouver de candidats ? Est-ce qu’il y a d’autres choses qui, pour toi, représentent l’échec dans le recrutement ou pas ?
Charles [00:27:28] Oui pour l’échec sur un recrutement, au-delà du fait de ne pas trouver un candidat, ça peut être aussi un échec dans la méthodologie. Ne pas s’être questionné sur la méthodologie, ne pas avoir dédié suffisamment de temps. Parce qu’on peut se retrouver aussi avec un poste qui n’est pas pourvu depuis longtemps. Et on se rend compte qu’en faisant une petite autocritique, on avait peut-être trop de postes à gérer, on n’a pas mis suffisamment de temps et de ressources dans un poste et donc quelque part, l’échec est peut-être dans les moyens qu’on a mis dedans. On parle évidemment du recruteur seul sur son bureau mais on peut travailler à deux sur un recrutement parfois, ce qui est une solution pour s’en sortir. Donc finalement, si on arrive à un point d’échec, à ne pas pourvoir un poste, et qu’on n’a pas essayé toutes les possibilités, ça peut être aussi là, quelque part le vrai échec. C’est de se dire on n’y arrive pas, mais on n’y a pas mis aussi tous les moyens et toutes les ressources disponibles pour y arriver. On parle en effet de task force à plusieurs recruteurs. Ça peut être en effet délégué aussi à une structure spécialisée dans le recrutement pour nous accompagner. Et de savoir aussi les missionner. C’est-à-dire que quand on est en situation d’échec, en tout cas de ne pas trouver le candidat, de savoir s’appuyer sur les bonnes ressources. C’est important en tout cas de se donner les moyens de ce que l’on peut être en échec malgré les appuis, mais au moins se donner les moyens. Je pense que c’est une bonne façon de se dire que certes, on n’a pas réussi à avoir le poste, on ne réussit pas à avoir le poste, mais on y a mis tous les moyens et ça, c’est toujours possible aussi.
L’étincelle RH [00:28:49] Est-ce que tu as d’autres peurs à nous partager aujourd’hui ?
Charles [00:28:52] Alors oui, je pense qu’on est tous soumis aux peurs. C’est un sujet qui me parle bien, un sujet dont on parle un peu en entretien de recrutement d’ailleurs. Les peurs sont assez révélatrices des choix qu’on peut faire dans notre vie ou des réflexes comportementaux qu’on a sur un poste. Donc oui, pour répondre simplement, j’ai encore des peurs. La peur de ne pas recruter, certes, par rapport à mon métier. Je pense aussi à la peur de tout simplement ne pas être au niveau. Je ne pense pas avoir une logique de compétiteur, mais en tout cas de professionnalisme et d’essayer de répondre aux besoins. Donc j’ai toujours cette peur, en effet, de ne pas avoir les bonnes méthodologies, de pas être suffisamment pertinent, pas assez formé et ne pas poser les bonnes questions. Et j’ai toujours cette peur de ne pas être assez bon, pas assez compétent. C’est aussi une capacité à me remettre en question qui est facile, pour me permettre de progresser. Mais ça reste quand même une peur de me dire voilà, est-ce que je vais y arriver.
L’étincelle RH [00:29:48] Comment on fait pour rester bon dans son métier ? C’est quoi tes sources d’apprentissage ? Tes motivations pour justement rester bon ?
Charles [00:29:55] Déjà, aimer son boulot, je pense ne pas le faire par défaut. C’est déjà la base pour rester intéressé par ce qu’on fait et se remettre en question. De rester ouvert. Je pense que le métier de recruteur il ne faut pas le voir comme un métier solitaire, ne pas le faire seul. Si on a la chance d’avoir un service d’échanges avec ses collègues, si on a la chance d’avoir d’autres collègues ailleurs, de partager ses problèmes, c’est important, mais aussi de s’aider en restant ouvert à de nouvelles méthodes ou à échanger avec d’autres structures, des cabinets spécialisés, des consultants et des agences. Être ouvert aussi aux nouvelles méthodes d’approche. On parle aussi par exemple de marketing digital puisqu’aujourd’hui le métier de recruteur, c’est certes identifié RH, mais c’est presque autant du marketing et du commerce quelque part. Donc je reste aussi ouvert à ça. Aux nouveaux outils aussi de se renseigner auprès des différents prestataires qui vous donnent des outils qui peuvent vous aider, faciliter les recherches, gagner du temps, structurer une recherche, etc. Donc je pense qu’il faut se remettre en question, ne pas dire que les recettes d’avant fonctionneront toujours. Et puis voilà d’avoir envie d’avancer, de se questionner et partager.
L’étincelle RH [00:31:04] Et à propos de partager, est-ce qu’il y a un recruteur, une personne que tu suis en particulier, que tu pourrais nous recommander ? Je suis jeune recruteur, j’ai envie d’apprendre, est-ce qu’il y a quelqu’un qu’il faut que j’aille suivre ? Qui t’inspire ou en tout cas sur lequel tu apprends ou que tu aimes aller lire ce qu’il partage ?
Charles [00:31:20] Oui, je butine un peu. Les noms ne viennent pas forcément, mais j’en ai au moins une qui me revient, qui est une personne qui publie pas mal sur LinkedIn, qui s’appelle Ellen Ly, qui diffuse un peu d’information justement sur le métier de recruteur, qui est passé maintenant du consultant-formateur-recruteur. Elle a du coup cette approche pédagogique dans le métier et j’essaie de me renseigner sur des personnes de ce type là qui finalement ont envie de retransmettre des tips, des actualités aussi sur le métier de recruteur. Donc j’ai plusieurs personnes que je suis, je n’ai pas les noms. L’étincelle en fait partie. Il y a du contenu, t’en fais partie Etienne, pour essayer de puiser des sources d’inspiration. Vous êtes assez pro-actif sur les différentes étapes du recrutement. Des modules sur bien rédiger une annonce aussi je pense.
L’étincelle RH [00:32:11] On n’est pour là notre promo *rires*
Charles [00:32:13] Mais je pense que c’est important de le souligner. Donc voilà j’essaie de rester ouvert, notamment sur LinkedIn qui est un bon pourvoyeur.
L’étincelle RH [00:32:20] A propos de ces notions de partage, est-ce que c’est facile de partager ses peurs en tant que recruteur ? On les partage avec qui ? Avec son boss ? Avec les candidats ? Avec les managers ?
Charles [00:32:31] Alors non les candidats pas trop pour être honnête. C’est vrai qu’on ne va pas partager ses peurs aux candidats parce que je pense qu’ils n’en ferait pas grand chose pour être honnête. Ou alors nos peurs dans l’intégration d’une entreprise peut-être. On peut essayer de transposer en effet des questions qu’on peut avoir sur une entreprise quand nous même on a été en situation de candidat, je pense que c’est plutôt là-dessus que peuvent transparaître des peurs, mais plutôt pas non.
On peut parler de nos peurs avec des managers, c’est clair. Mais plus encore, je pense avec nos collègues et clairement avec nos pairs. C’est-à-dire RH, recruteurs, autres recruteurs s’il y en a. Parce qu’on se rend compte qu’on est souvent soumis aux mêmes problèmes quand on bute, quand on a peur. Les autres partagent aussi nos peurs et en fait, quand on diffuse notre peur, on projette des choses, des vécus que les autres ont aussi eu et ils nous amènent des solutions derrière parce qu’ils ont eux mêmes outrepassé ses peurs, parce que les blocages qu’ils ont connu ils ont dépassé, ils ont utilisé des outils, ils ont utilisé des démarches, ils ont pris du recul, tout simplement. Et c’est instructif. Mais il faut avoir quand même la chance d’être bien entouré. Deux choses à cela, deux manières : l’entreprise dans laquelle vous êtes. La chance d’avoir un service RH c’est important. Sinon, pour ceux qui sont tout seuls dans leur métier, je leur conseillerais de s’ouvrir aux autres et de s’ouvrir à d’autres interlocuteurs dans d’autres entreprises, donc des groupes de partage, prestataires recrutement, peu importe, mais de parler.
L’étincelle RH [00:33:50] On parle des candidats. En effet, on ne partage pas nos peurs aux candidats. Par contre, on est amené à gérer les peurs des candidats, les peurs des managers, et parfois il y a des recrutements qui n’aboutissent pas. A la fois est-ce que le manager a des peurs sur sa décision finale ? A la fois les candidats ont des peurs dans un changement, changement de vie, changement géographique… C’est quoi les clés pour accompagner ces peurs en tant que recruteur et faire qu’elles ne deviennent pas des points de blocage dans un processus quand on a trouvé finalement le bon candidat ?
Charles [00:34:18] Je pense que là, tu pointes vraiment quelque chose d’assez clé dans un recrutement, puisque finalement il y a des moments où on ne va pas réussir à pourvoir un poste du côté du candidat ou du côté du manager en effet à cause de certaines peurs. Qui peuvent être souvent liées à des préjugés d’un côté comme de l’autre.
Si je prends le cas du candidat, il peut avoir des préjugés sur la manière dont ça se passe en entreprise parce qu’on parle de notoriété, on parle de marque employeur – elle peut parfois aussi véhiculer une image qui ne correspond pas à ce que finalement le candidat espère.
Dans le cadre de l’industrie on peut aussi démystifier le fait que l’industrie, ce n’est pas que des hommes et puis du métal. C’est aussi maintenant des femmes, beaucoup de femmes et des métiers tout à fait divers, très variés. Et donc l’environnement est maintenant finalement très women friendly quelque part. Donc ça, on peut aussi le démystifier, cette peur de se retrouver être la seule femme en service ce qui n’est pas forcément sur le cas. Et si c’est le cas, ça peut être aussi un atout.
Du côté manager, évidemment, les peurs sont présentes. La peur de se tromper. On va encore une fois être dans la peur de l’échec, mais la peur de se tromper de candidat, avec les conséquences que ça a. Des peurs aussi de faire un choix qu’il n’avait pas prévu justement, de renier certains de ses critères. Ça peut être ça aussi. Ou parce qu’elle peut être impalpable. C’est-à-dire qu’en entretien il se passe des choses qu’un recruteur ne maîtrise pas, qui est de l’ordre du ressenti. Et donc on peut avoir un blocage psychologique à dire non. Un manager peut vous dire “je ne le sens pas”, sans pouvoir détailler, mais derrière, il y a une peur. Pourquoi ? Parce que la personne n’a pas assez exprimé ses émotions ou ses motivations, ou il a peur que la personne ne s’intègre pas alors qu’il se peut que ce soit une personne qui va s’intégrer facilement. Le contexte d’un entretien de recrutement peut créer des petits blocages.
Donc typiquement, on a des peurs qui ressortent, qui sont irrationnelles et qu’on peut lever avec un nouvel échange avec le candidat hors contexte recrutement finalement, un peu en informel. Ou avec le manager en faisant un débrief après un échange et en essayant de réduire l’impact des rémanences que les préjugés peuvent avoir. Quand je parle de préjugés, c’est-à-dire des attentes qui sont infondées, qui sont tirées d’interprétations erronées.
L’étincelle RH [00:36:23] Merci Charles. Pour conclure notre échange, quel dernier mot ou conseil tu as envie de partager aux gens qui nous écoutent ?
Charles [00:36:31] Un conseil : écoutez vos peurs tout simplement. Ecoutez vos peurs parce que je pense qu’elles indiquent beaucoup de choses et en même temps de ne pas leur laisser toute la place. Parce que la peur, ça peut être aussi sclérosant. Donc d’en faire un allié utile, de la peur quelle qu’elle soit. Et puis on se rend compte aussi, avec du recul, que finalement il y a quand même pas grand chose de très grave quand même, surtout dans un métier tel que le nôtre en RH-recrutement. En tout cas, ne pas pourvoir un poste c’est pas la fin du monde et parfois la lumière est au bout du tunnel. Donc voilà, je dirais de ne pas trop dramatiser.
L’étincelle RH Merci d’avoir écouté Bande de Flippés. Un podcast imaginé et produit par L’étincelle RH en partenariat avec myRHline. Si vous avez des remarques, des suggestions ou si vous voulez partager vos peurs, n’hésitez pas à envoyer un message sur LinkedIn à Etienne Ageneau ou Christophe Patte. On se retrouve dans deux semaines pour découvrir un autre membre de la Bande de Flippés. Bouh.