Dernière mise à jour le 09/08/2024
Personne ne connait mon métier. Par personne, je veux dire les gens extérieurs au monde du recrutement (#moldus). Même au sein de cette grande famille, peu comprennent réellement le métier du sourcing, ses techniques, son importance et surtout l’amour que l’on peut éprouver à le faire. J’ai ma façon pour vulgariser la discipline : je la compare à la séduction.
Spoiler : je ne suis pas la seule à employer cette métaphore.
Certains gourous de la profession le font aussi (et très bien même). C’est parfois un parallèle délicat à faire (je vois déjà les haussements de sourcils réprobateurs) mais je le préfère à celui du chasseur de tête qui tire sur tout ce qui bouge.
Candidat qui rit
Je vois mon métier dans le sourcing comme une multitude de missions passionnantes : l’analyse du besoin, la recherche, l’approche et la relation.
1. L’analyse du besoin
L’enjeu n’est pas de récupérer une simple liste de critères pour faire le portrait-robot du futur collaborateur. Non. Le vrai défi, c’est percevoir ce dont le client a réellement besoin (il l’ignore parfois lui-même). Rêver d’un beau Tarzan qui aime les week-ends de survie dans la forêt, c’est bien ; mais si ta passion, c’est de regarder Netflix au chaud sous un plaid, Tarzan ne te servira à rien. Même vérité pour les entreprises. #NetflixAndChill
2. La recherche
Partir en quête DU bon candidat, c’est tout un art. On peut : soit croiser les doigts et se dire qu’il va miraculeusement voir notre annonce et y répondre (parfois ça marche – si si, je vous jure) ; soit décider d’aller soi-même le chercher, sur les cvthèques ou les réseaux sociaux, alors qu’il ne sait pas encore que le poste existe et que c’est THE job pour lui.
Oui, je fais un métier de foufolle quand on y pense. Dit autrement : tu peux rester chez toi, bras croisés sur ton canapé, te dire que la personne de tes rêves va frapper à ta porte. Ou bien prendre les devants et aller sur les sites de rencontre et sortir à des évènements.
3. L’approche
C’est la plus grosse difficulté. C’est bien beau d’avoir des cœurs dans les yeux quand on voit la personne idéale, mais ça ne suffit pas pour que celle-ci s’intéresse à vous. Vient le temps de pratiquer un exercice périlleux et décisif – lumière qui fait peur, musique inspirée du son s’échappant de la bouche des enfers : l’approche !
En sourcing comme en séduction, même règle impitoyable : il n’y a pas de seconde chance. Pour éviter de se prendre les pieds dans le tapis puis de voir l’être aimé ou le·la candidat·e idéal·e s’en aller au loin, il convient de soigner son entrée. J’ai trois principes :
- Personnaliser
Il est nécessaire de faire référence à la personne. Est-ce vraiment surprenant ? Il faut lui prouver que l’on a choisi de s’adresser à elle, qu’elle n’est pas noyée dans une foule de copiés-collés. À défaut de personnalisation, l’approche pourrait bien ressembler à : « Ton père est un voleur, il a volé toutes les étoiles du ciel pour les mettre dans tes yeux. » - Briser la glace
Pour briller dans la foule de prétendant·e·s (ou de recruteurs / recruteuses), apporter un brin d’originalité est impératif. L’humour est un bon moyen de se démarquer. Comme on dit chez nous : «Candidat qui rit à moitié dans ta messagerie». - Susciter la curiosité
Faire monter doucement la sauce est essentiel pour donner envie d’enclencher une conversation. Le poussiéreux et pourtant toujours utilisé : « Bonjour, j’ai un poste de commercial au sein d’une entreprise leader sur son marché qui correspond à votre profil » peut aisément se traduire par « Salut, on se connait pas mais je suis le meilleur, tu veux m’épouser ? » ou plus vulgairement « Salut, tu b*ises ? ». Soyons honnêtes : ça ne marche jamais. JAMAIS. Pour susciter l’intérêt, j’utilise une façon de faire que j’appelle, peut-être maladroitement, le strip-tease. Je vous rassure, personne n’enlève de vêtements dans l’histoire. Il s’agit uniquement de distiller des informations au compte goutte, et au bon moment.
4. La relation
Les échanges sont à soigner du début à la fin. Particulièrement la fin. D’aucuns diront : «à quoi bon devenir ami après une rupture ?» La réponse est simple : la relation sourceur / candidat est avant tout une histoire d’humains, avec tout l’engagement et le respect réciproques que cela implique. De plus, un refus aujourd’hui peut faire une belle rencontre demain. C’est souvent une histoire de timing.
Prenons l’exemple d’une réponse négative à faire à un candidat suite à un échange téléphonique qui malheureusement n’aboutira pas. C’est un moment désagréable pour le candidat et pour le sourceur ou la sourceuse, mais inévitable. Certes, il serait tellement plus simple d’envoyer un banal mail : cela prendrait peu de temps, et n’engagerait pas émotionnellement. Oui mais voilà : on ne largue pas par SMS (ou par mail, donc).
Bref, les parallèles entre séduction et sourcing sont évidents. Cette posture permet souvent de faire les choses de façon plus humaine. Nous avons tou·te·s, tour à tour, été séducteur·rice, séduit·e ou quitté·e. Dans le métier du sourcing comme dans nombre d’autres, l’empathie est un bien nécessaire.
Tu es mon étincelle
Parfois, à ma plus grande surprise, la séduction – la vraie – s’immisce dans les échanges. Sans qu’un schéma n’apparaisse pour autant :
- Différentes personnes
Tous métiers, statuts, niveaux d’études et secteurs d’activité - Différents cas de figure
Message spontané sur Linkedin, réponse à une approche, après un échange téléphonique, après une suite d’échanges, etc.
Les gens restent toujours polis, insistent parfois mais jamais lourdement. Ces situations, en apparence gênantes, sont finalement amusantes, de par l’originalité et la créativité de leurs auteurs. J’ai en tête quelques exemples :
- un « Tu es mon étincelle, Cécilia » envoyé sur Linkedin avec une demande d’invitation ;
- un candidat qui me remerciait de ma « conversation ravissante » après un échange téléphonique ;
- l’approche spontanée d’un homme me vantant les mérites de son pays très lointain, et me proposant de venir y passer mes prochaines vacances.
Ces messages n’ont pas d’incidence, mais si j’ai eu un échange (téléphonique ou écrit) avec la personne avant qu’elle ne glisse vers la séduction, je ne peux m’empêcher de me remettre en question.
Finalement, l’essence même de mon métier est, d’une certaine façon, de maîtriser l’art de la rédaction. Je mène alors mon enquête, parcourant attentivement l’ensemble de nos échanges. Peut-il y avoir une double interprétation à cette phrase écrite ou prononcée ? Le moindre emoji, et dieu sait que j’en utilise beaucoup, prend alors des allures de potentiel facteur de déclenchement. Ce smiley peut-il porter à confusion ? Après analyse, je n’ai jamais eu l’impression d’aller trop loin, ni d’avoir induit ce genre de déclarations.
La vérité est bien plus simple : nous travaillons dans le domaine de l’humain, il est donc normal d’avoir ce genre de surprises. C’est d’ailleurs ce qui fait le charme de mon métier. Donc, bon, hein, rien de bien méchant dans cette affaire. Et pourtant…
Sourceuse un jour
Il y a une vraie déviance à être sourceur, en lien avec la séduction. Trois mots : applis de rencontre. Pour celles et ceux qui n’ont jamais vu d’appli de rencontre (#mytho), sachez qu’on vous demande souvent de renseigner votre métier. Ce n’est pas une information obligatoire mais, bizarrement, beaucoup de personnes la renseignent. Conséquence toute personnelle : j’ai l’impression d’être dans une nouvelle cvthèque ! Sourceuse un jour, sourceuse toujours. Oh, un technicien de maintenance. Oh, un conducteur de travaux. Me voilà tentée de les contacter, mais pour leur proposer un poste.
Damned.
Le sourcing, c’est de la séduction, LinkedIn is the new Tinder et moi, je suis toujours célibataire. #AdopteUneSourceuse
Mange dans des sachets plastique et dort parfois sous son bureau.